Deux de mes petites madeleines : les fables de la Fontaine, toujours si actuelles, si pertinentes et impertinentes et les superbes illustrations de l’imagerie d’Epinal. Gallica, le site numérique de la Bibliothèque de France met en ligne ces ouvrages. Une merveille.
Mon inclinaison pour Jean La Fontaine
Elle se trouve fortifiée car il était apprécié de Nicolas Fouquet dont le sort cruel m’indigne. Il vivait à Vaux-le-Vicomte – très joli logis, isn’t it ? – depuis 1659, sous sa protection. Le surintendant sera emprisonné le 5 septembre 1661 sur ordre du Roi Soleil tandis que La Fontaine finissait Le Songe de Vaux – Éloge des Jardins, pour le remercier de sa protection. J’ai beaucoup aimé les quatre muses : Hortésie en allégorie du jardinage, Apellanire de la peinture, Palatiane de l’architecture et Calliopée de la poésie).(1) Selon La Fontaine, ce recueil serait imparfait. La Fontaine restera attaché à Fouquet, ce qui lui vaudra l’exil à Limoges.
Les fables de La Fontaine
Les Fables font partie des ouvrages ad usum Delphini, id est* destinés à l’éducation du Dauphin. Le premier recueil paru en 1668 comporte « Une dédicace à Monsieur Le Dauphin » le fils de Louis XIV alors âgé de 7 ans. Elles sont destinées à amuser mais aussi à instruire en distrayant.
L’anthropomorphisme nous permet plus facilement, de voir nos défauts et par là même la poutre que nous avons dans notre oeil.
* i.d en latin : c’est-à-dire- Je suis toujours en croisade contre la réforme du collège qui fera mourir les langues anciennes.
Recueil 1, Livre 1, fable 2
Tout le monde connaît cette fable par cœur. Cette célèbre morale semble peu chrétienne et égoïste. Et pourtant, elle m’est en évidence notre responsabilité face à notre vie. J’ai envie d’ajouter que l’on récolte que ce que l’on sème. Elle bât en brèche l’assistanat qui peut être mortifère. Elle pose aussi deux questions : Faut-il être prévoyant comme la Fourmi, mais alors tolérer l’égoïsme ? Ou faut-il jouir de l’instant présent comme la Cigale ? Cette fable est une mine d’or philosophique.
Recueil 1, Livre 1, fable 3
« Apprenez que tout flatteur vit aux dépens que celui qui l’écoute ». Qui sont le corbeau et le renard dans la société du XXIe siècle ?
« Tout prince a des ambassadeurs, // Tout marquis veut avoir des pages ». Satire de la démesure ? Grenouiller veut dire comploter, manœuvrer, intriguer, entreprendre des tractations malhonnêtes pour obtenir ce que possède l’autre. Beaucoup rêvent, même éveillés, de splendeurs, de lustre et de célébrité, jusqu’à se renier ainsi que tous leurs amis. L’envie est un vilain défaut.
Recueil 1, Livre 6, fable 9
Cette illustration est une de mes préférées. Elle est si parlante.
Nous faisons cas du Beau, nous méprisons l’Utile ;
Et le Beau souvent nous détruit.
Moins connue, cette fable est toujours d’actualité : Notre apparence dont nous sommes si soucieux nous fait parfois ignorer les qualités qui nous rendent précieux aux yeux des autres et aux nôtres.
Recueil 1, Livre 6, fable 10
La morale de cette fable est connue du monde entier et se retrouve dans des conseils en management. La morale que je retiens est qu’il ne faut jamais préjuger de la fin, ne jamais se décourager en se déclarant d’emblée perdant face à d’ostensibles avantages d’un matamore, ne jamais partir perdant. Et à contrario, ne pas se croire supérieur de celui qui semble désavantagé de prime abord. L’orgueil est un vilan travers.
Recueil 1, Livre 1, fable 10
J’aime beaucoup cette fable pour des raisons que je partage avec Filsauxyeuxbleus. J’ai aussi dans une malle-souvenirs le costume de loup que j’avais confectionné pour la représentation de cette fable lors de la kermesse de l’école primaire.( Evidemment, l’institutrice avait choisi une fille pour jouer l’agneau, lui étant le loup !) Le « tu seras chatié de ta témérité »résonne dans nos oreilles et nous font sourire.
« La raison du plus fort est toujours la meilleure ». Point de morale dans cette fable, juste le constat désespérant que la mauvaise foi, l’agressivité peuvent tout justifier face à la naïveté.
Recueil 1, Livre 2, fable 16
Cette fable de Jean de la Fontaine est une mise en garde contre la vanité, la prétention et les méfaits de l’imitation. Cela m’évoque aussi le « Connais-toi toi-même » inscrit au frontispice du Temple de Delphes. Connaître ses limites, savoir ce pourquoi nous sommes fait, rester authentique sont des atouts.
La Fontaine a écrit 243 fables réunies dans III recueils composés chacun d’un certains nombres de livres. « Je me sers d’animaux pour instruire les hommes. » disait Jean de La Fontaine. Si le premier recueil était destiné au dauphin, les deux autres recueils ont des buts différents. Le second- plus politique, il décrit les moeurs de l’époque- fut dédicacé à la belle madame de Montespan : La Fontaine y fait l’apologie de la beauté de la puissante favorite du Roi depuis dix ans. Certains laissent à penser que ce recueil a tout du carnet intime de l’auteur et s’adressent à des lecteurs plus avertis. Ne se contentant pas d’être belle, elle avait de l’esprit et s’avèrait être une protectrice éclairée pour les gens de lettres. Le dernier sera dédié au duc de Bourgogne petit fils du roi Louis XIV.
Si La Fontaine comptait d’illustres admirateurs en Madame de Sévigné, la Bruyère, Goethe, Chamfort, Stendhal, Chateaubriand, George Sand, et même Hugo qui admirait sa versifigation -, il avait aussi ses détracteurs : Rousseau, Napoléon 1er, Lamartine, Rimbaud. On ne peut plaire à tout le monde . « Ad impossibilia nemo tenetur » À l’impossible nul n’est tenu.
Les fables de La Fontaine, toujours si actuelles.
Vous ne croyez pas ?
(1) Songe de Vaux de Jean de La Fontaine – Site Gallica, BNF
C’est que les fables de la Fontaine sont toujours d’actualité, combien avons nous été à les apprendre avec plaisir sur les bancs de l’école ?
un très bel article
Merci Bernie, c’est très gentil. La Fontaine facilite l’apprentissage de la langue aussi. A bientôt.
Ma maman me lisait à chaque fois qu’elle pouvait une histoire. Elle le fait maintenant pour ma fille. J’adore, merci Bernie.
Ma maman me lisait à chaque fois qu’elle pouvait une histoire et maintenant elle le fait pour ma fille. J’adore, merci Bernie.
Bonjour Nassima, j’ai fait de même avec nos enfants 😉 Ces rituels sont merveilleux. Bonne journée
Une petite visite à la Cité de l’Image d’ Epinal est toujours un plaisir..on peut y voir nombre de planches lithographiques d’époque, des presses également d’ époque, sans parler de tous les lithos contemporaines ( j’en ai d’ailleurs 2 dans mon salon).. rien que d’en parler me donne envie d’ y retourner !!
Je comprends Tyaz votre engouement. J’adore aussi
Bonjour
Très beau travail….
je suis formateur à l’ESPE de Bretagne (école de formation des professeurs à Rennes). je suis en train actuellement de réaliser une formation en ligne et à distance pour le ministère de l’éducation nationale sur l’enseignement de la compréhension de la fable le Loup et L’agneau sur une plate forme de l’éducation nationale (http://www.education.gouv.fr/cid72318/m@gistere-accompagner-la-formation-continue-des-professeurs-des-ecoles.html)
Il se trouve que ma fille avait appris les fables dans un livre intitulé Fables de La fontaine chez hachette en 1978 avec les imageries Pellerin comme illustrations. j’ai longtemps cherché à utiliser la reproduction très anthropomorphique du Loup et de l’agneau dans cette imagerie. est-il possible d’en avoir les droits d’usage sans intérêt commercial bien sûr pour illustrer une page de ma formation (en citant les sources bien entendu)? Puis je réutiliser votre image à cette fin?
Merci de votre réponse
Cordialement
LL
Bonjour Loïs, merci. En effet, ces illustrations sont superbes. Je suis bien entendu favorable au partage de ces reproduction mais je crois que le plus sage pour un site professionnel est de s’adresser à Gallica, le site numérique de la Bibliothèque de France. Je me permettrais de suivre votre projet qui m’enthousiasme. Beau vendredi.