Alexandra David-Néel, « la dame de Digne » est une de mes figures de proue. J’ai beaucoup d’admiration pour cette exploratrice en recherche de sagesse et qui l’atteignit. Elle est celle qui a fait connaître le bouddhisme tibétain à l’Occident.(1) Sa vie est une suite de périples incroyables. «Ce n’est pas le but qui compte, mais le chemin qui y mène» écrira-t-elle.
Qui est Alexandra David-Néel ?
Louise Eugénie Alexandrine Marie David est née à Saint Mandé, le 24 octobre 1868. Dès son plus jeune âge, elle fut éprise de liberté et d’études. A 5 ans, elle s’échappe déjà pour explorer le Bois de Vincennes.. Elle eut une jeunesse banale à Bruxelles, néanmoins son désir de voyager s’intensifiait et surtout celui d’étudier: chaque soir, depuis ses six ans, elle lisait un verset de la Bible, Épictète fut son livre de chevet…et elle fuguait toujours..
A 18 ans, après un petit voyage en Espagne, elle fait surement le premier tour de France en pédalant de la côte d’Azur au Mont St Michel. Un observateur averti aurait déjà noté qu’elle choisissait le chemin le plus long avec le moyen de locomotion le moins rapide..
Alexandra étudie les philosophies orientales à Londres, visite Paris dans ses moindres recoins, a une prédilection pour le musée Guimet, est auditeur libre à la Sorbonne. Elle écrit un traité anarchiste avec Elisée Reclus, un géographe, ami de son père avec qui elle noua une grande amitié. Les éditeurs refusent son imprimatur tant son rejet de l’autorité est grand, surtout pour une femme.
Elle fut chanteuse lyrique sous le pseudonyme de Alexandra Myrial – elle incarnera Carmen de Bizet, Marguerite de Faust.. – des femmes fortes et libres- durant deux saisons. Elle écrivit sous ce pseudo le livret de LIBRIA avec le pianiste Jean Haustont. Mais les projecteurs, les bravos l’éloignent de son amour pour les déserts.. Elle abandonne la carrière lyrique.
Alexandra David-Néel exploratrice
Grâce à l’héritage d’une marraine, elle part pour l’Inde en 1890, elle sillonne ces régions pendant une année, elle est émerveillée par les montagnes tibétaines. Elle est sûre d’y revenir un jour… Fidèle à son principe d’emprunter le chemin le plus long, elle passe par Tunis où elle fait la connaissance de Philippe Néel, charmant ingénieur des chemins de fer. Laissant de côté ses idées féministes, à 36 ans, elle l’épouse en 1904. Mais, la vie de couple ne lui convient pas, elle déprime.. Son époux la comprend.
En 1911, elle part pour son troisième voyage d’études en Inde. Elle devait rester 18 mois, elle y resta 14 ans !
Au Sikkim, sous la protection du souverain, elle étudie le bouddhisme. Elle y rencontre un jeune lama Aphur Yongden dont elle fera son fils adoptif en 1929 . Ensemble, ils s’isolent dans la caverne d’un ermitage à 4000 mètres où elle reçoit les enseignements d’ermites. Etant situé à la frontière tibétaine, elle la franchit plusieurs fois. A cause de ces incartades, elle est expulsée de Sikkim en 1916.
C’est la première guerre mondiale en Europe. Impossible de rentrer ! Elle étudie en Inde, puis au Japon, en Corée, à Pékin. Cette intrépide femme traverse la Chine, le Gobi, la Mongolie. Elle séjourne trois ans au monastère de Kumbum, berceau de l’école Gelugpa du bouddhisme tibétain(2) pour toujours étudier plus. Le Tibet lui manque ! Elle, vêtue de haillons, Yongden de son habit de lama, ils arrivent à Lhassa en 1924.
Alexandra David-Néel fut la première femme européenne à séjourner au Tibet.
Deux mois mis à profit à visiter tous les monastères de la ville sainte. Une voisine intriguée et curieuse ayant remarqué que la « clocharde » se rendait à la rivière tous les matins pour ses ablutions, la dénonça aux autorités. Cependant le gouverneur les laissa continuer leur périple. Sans le sou, exténués, ils furent recueillis par Mac Donald, un agent commercial britannique qui leur procura des papiers pour leur retour en France, en 1925.
Elle se fixe dans le Sud et agrandit une bâtisse acquise à Digne pour en faire son Samten-Dzong, sa forteresse de méditation sur les bords de la Bléone, face au pic du Couar qu’elle aimait appeler son « Himalaya pour Lilliputiens ». L’exploratrice se sépare de son mari – ils conserveront une amitié indéfectible – et entreprend avec Yongden, des tournées de conférences. Elle écrit le récit de ses aventures et le fruit de ses recherches spirituelles.(3)
A 69 ans, elle repart avec son fidèle compagnon, en 1937, via Bruxelles, puis par le Transsibérien, elle arrive en Chine. Toujours les chemins les plus longs.. En pleine guerre sino-japonaise, elle va côtoyer la misère, la guerre, les atrocités.. Elle y apprend la mort de son mari, en 1941 ; Affectée, elle écrit « J’ai perdu le meilleur des maris, mon meilleur ami ». Fuyant, survivant difficilement, ils arrivent en Inde en 1946.
Alexandra David-Néel de retour en France
Retour en France. Elle a 79 ans. Elle écrit, fait des tournées de conférences, étudie, toujours et toujours. Son fils Yongden meurt en 1955. Elle enrage contre ce corps qui lui fait défaut. Percluse de rhumatismes, elle continuera de travailler (4).
Elle meurt le 8 septembre 1969, à Digne. Quelques mois avant son dernier voyage, elle avait fait refaire son passeport..à 101 ans. C’est à Bénarès, le 28 février 1973, que les cendres de l’exploratrice du Tibet et de son fils adoptif le Lama Yongden ont été immergées dans le Gange.
Sources :site Alexandra David-Néel – photographies (cliquez sur les photographies pour les agrandir ;): ADN- Alexandra adolescente-
(1) Le 15 octobre 1982, puis du 21 au 26 mai 1986 Sa Sainteté le XIVème Dalaï-Lama est venu à Digne visiter sa maison « Samten-Dzong » rendant ainsi hommage au courage d’Alexandra David-Néel qui, par son oeuvre, a fait connaître aux occidentaux le haut pays des neiges. (2) Amdo, cette région du Tibet était contrôlée par la Chine; elle y a traduit la fameuse Prajnaparamita. (3) bibliographie de Alexandra David-Néel –articles– (4) la pièce de Michel Lengliney, » Alexandra David Néel , mon Tibet » retrace sa vieillesse auprès de sa gouvernante Marie-Madeleine PEYRONNET, responsable de sa fondation; Il dépeint une femme acariâtre, sans compassion, autoritaire, misanthrope, …Si « la dame de Digne » ne peut se déplacer qu’avec une canne et d’une béquille, son esprit et sa mémoire sont toujours aussi vif .
Pour en savoir encore plus en images:
Grande Dame !! Merci de l’évoquer
c’est effectivement une grande dame, dont on envie un peu le parcours;)
Une de mes héroïnes !