Non, ce n’est pas une perte de poids grâce au régime truckemuche. C’est le nombre de livres lus par an.
La 36 ème édition du Salon du livre de Paris devenu Livre Paris, l’événement culturel et littéraire le plus populaire de France et l’un des plus reconnus à l’international, c’est fini et à l’année prochaine. Les organisateurs constatent une baisse de fréquentation de 15% malgré quelque 3.000 écrivains pendant quatre jours. Conjoncturel me direz-vous ? Ou parce que le salon était phagocyté par les politiques ?
Y aurait-il plus d’écrivains que de lecteurs ?
Un sondage de Monbestseller.com nous informe que 17% des français ont un roman, des nouvelles, des poèmes en chantier. C’est impressionnant, une nation d’écrivains. Mais hélas, si les mêmes lisent de moins en moins.
« Seulement 28% des Français lisent plus de 9 livres par an, 13% n’ouvrent jamais un livre, selon un sondage Ifop pour Dimanche Ouest-France
Continuons à examiner les chiffres : 55%, lisent entre 1 et 9 livres par an, selon leurs déclarations. Les personnes lisant plus de 15 livres par an se font de plus en plus rares : elles ne sont plus que 17%, contre 20% lors d’un précédent sondage en 2011 et 27% en 2006.
Et lire un journal ? Le nombre de lecteurs est aussi à la baisse : 7% à 5% « dans un contexte marqué par la chute de la diffusion des quotidiens », relève l’Ifop.
Pourquoi lit-on ?
Selon cette enquête, » la lecture d’un livre est toujours considérée comme l’activité ayant la plus grande valeur culturelle pour 32% des personnes interrogées (+3 points par rapport à mars 2011). »
Lire modifie notre cerveau. Des IRM l’attestent.
Lire est un divertissement, c’est un fait indéniable. Mais pas seulement. Lire nous offre des vies par procuration. La fiction nous propose un autre regard sur les autres, sur nous, elle augmente notre expérience, surtout la lecture de roman. Grâce au livre, nous endossons divers costumes que nous n’aurions jamais pu/voulu enfiler : roi, reine, pourri, capitaine au long cours, déprimé, détective, héros, samouraï, concubine, dictateur, amoureuse, pauvre hère, une délicieuse vieille dame ou une voleuse de grands chemins…. Tout est possible et sans danger ! Plus encore lorsque le livre est écrit à la première personne : avec le « Je », nous reprenons l’histoire à notre compte.
« Ceux qui ne lisent pas de livres n’ont qu’une seule vie, les pauvres : la leur. » Umberto Eco
Tout roman parle à notre intelligence et à notre cœur. Umberto Eco comparait la lecture d’un roman à un jeu d’échec : le lecteur vit la vie du personnage et ses tribulations mais aussi il émet des hypothèses sur la suite ou la véracité de l’histoire grâce à son esprit critique. Le lecteur doit combler ce qui est incomplet, les « non-dit », les « blancs »
« On ne devrait lire, que des livres qui vous mordent et vous piquent… Un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. » Kafka
Lire, c’est plus que converser avec de grands auteurs. C’est aussi une confrontation à d’autres langues, d’autres mondes et un échange de pensée.
« On ne lit jamais un livre. On se lit à travers les livres, soit pour se découvrir, soit pour se contrôler. » Romain Rolland
Relire, est-ce lire ?
Je lis beaucoup, je ne peux passer un jour sans lire. Je me régale avec plus de 4 livres par mois lorsque je ne suis pas en vacances. Je relis beaucoup aussi d’œuvres que j’ai lu plus jeune. Vous vous insurgez ? Vous vous dites que déjà vous avez une pile à lire plus haute que Big Ben alors relire des choses déjà lues ? J’ai relu quasi tout Pearl Buck il y a quelques temps : je souhaitais savoir si ces livres que j’ai lu adolescente, me feraient autant plaisir*. J’ai relu Kafka et cette fois, j’ai entrevu son génie. Il y a de multiples autres bonnes raisons : je suis sentimentale donc j’aime remettre à l’honneur un livre que j’ai adoré, j’ai lu beaucoup de classiques et avec la maturité, je constate qu’à la relecture, je comprends mieux, que beaucoup de choses m’avaient échappées et me permettent un belle introspection. J’aime la répartie du farouche doctrinaire Pierre-Paul Royer-Collard : « Je ne lis plus : je relis » (1). Pourquoi ? Héraclite disait :
« À ceux qui descendent dans les mêmes fleuves surviennent toujours d’autres et d’autres eaux. »
. Le proverbe dit plus simplement qu’on ne descend jamais le même fleuve. En effet, j’ai changé, les mots ont changé de sens, mes impressions, mes émotions, ma compréhension aussi.
On peut indifféremment lire sur liseuse ou sur papier, pourvu qu’on lise !
Sources : http://www.monbestseller.com/ – Umberto Eco, Lector in fabula. Le rôle du lecteur, trad. fr. Grasset, 1985- (1) Alfred de Vigny se présenta un matin, sans être attendu, chez le farouche doctrinaire, qui était en conférence avec MM. Decazes et Mole. Il fit passer sa carte et insista pour être introduit. Royer-Collard, qui n’aimait guère à être dérangé, le reçut avec un sans-façon qui frisait l’impolitesse :
« Mais je suis M. de Vigny, monsieur.—Je n’ai pas l’honneur de vous connaître… — Je me présente pour l’Académie ; je suis l’auteur de plusieurs ouvrages dramatiques représentés… — Monsieur, je ne vais jamais au théâtre. — Mais j’ai fait plusieurs ouvrages qui ont eu quelque succès et que vous avez pu lire. — Je ne lis plus, monsieur, je relis. » dicoperso
* en fait, oui. Nous en reparlerons.
Je fais partie sans problème des 28% de français qui lisent plus de 9 livres par an ! Je lis et je relis aussi car en effet c’est toujours une lecture différente au fur et à mesure que les années passent. Certains classiques lus alors que j’étais trop jeune, prennent tout leur sens aujourd’hui et un auteur aimé hier peut paraître moins intéressant aujourd’hui ou vice versa.
Merci pour tes articles toujours aussi intéressants et les jolies photos toujours bien à-propos, même si je n’ai pas toujours le temps de venir l’écrire ici…
Bonjour Manou, je vois que nous avons le même regard et le même abord de la lecture. En effet les lectures de lycée, prennent de bien plus belles couleurs avec la maturité et le plaisir. Merci