Fêter la Saint Nicolas, en période de la Covid n’est pas aussi féérique. Seul l’est de la France et Fribourg fêtent ce grand saint, évêque de Myre. Dommage ! Chaque région a ses traditions et la Provence, est très riche dans ce domaine. Et dans le Sud, le 4 décembre, nous fêtons la sainte Barbe. En hommage, ils plantent le blé de la sainte Barbe pour la table du « Gros Souper ».
Le blé à la sainte Barbe : les préparatifs commencent 21 jours avant Noël
Si vous n’avez pas planté votre blé de la sainte Barbe, ce sera pour l’an prochain. Je vous ai déjà raconté l’histoire de cette tradition dans un autre chronique : le blé de la sainte Barbe et mon adaptation libre à planter des lentilles ! Cette année, plus prudente – plus organisée diront certains – j’ai planté du blé…
« Quand lou blad vèn ben, tout vèn bèn ! » Quand le blé vient bien, tout vient bien
Ce qui en d’autres mots, veut dire que si le blé de la sainte Barbe est beau et vigoureux à Noël, la récolte sera bonne. Les assiettes ou «sietoun» de blé de la Sainte-Barbe égayeront la table du lou gros soupa, en provençal ou Gros souper, de la nuit du 24 décembre. Vous pensez réveillon et agapes ? Pas tout à fait : il s’agit d’un repas maigre, c’est-à-dire avec des plats simples et sans viande avant la messe de minuit.
Sur la table du Gros Souper
Le gros souper était précédé de la cérémonie du « Cacho fio » dont je vous reparlerai. Tout commence par le dressage de la table. Trois nappes de taille décroissante sont disposées sur une grande table : une pour le gros souper, une pour le repas de midi du 25 Décembre et la troisième pour le soir du 25. (Voyez sur l’image ci-dessous ) Le nombre de trois est un symbole de la sainte Trinité, vous le saviez ! Attention ! Les pans des nappes ne doivent pas toucher le sol ! Car on raconte que les restes des treize desserts sont mangés par les anges et s’ils ne peuvent point s’engouffrer dessous, ce sera le diable qui le fera ! Vous voila prévenu(e) ! De la même façon, les nappes seront secouées dehors, car jetés ainsi aux quatre vents, elles seront gages d’une récolte fructueuse.
Sur cette nappe, sont disposés les trois assiettes du blé de la sainte Barbe – symboles de la fécondité, la fertilité et la fraternité – , une branche de houx pour apporter le bonheur et trois bougies ( symbole des trois temps : passé souvenir pour nos proches décédés, présent témoignage de fidélité à nos parents et amis et futur pour l’espérance de futurs enfants ). Le pain disposé à l’endroit est coupé en trois parts : la « part du pauvre » – qui peut être une personne qui nous a quittés et qui nous manque ou un indigent -, la « part fétiche » qui sera conservée dans un placard et la « part des convives ».
Pourquoi « gros souper» ? Il l’était si nous comparons à l’ordinaire. Le Gros Souper est composé de 7 plats maigres, en souvenir des 7 douleurs de la Vierge Marie. Il commence par l’aigo boulido, soupe provençale préparée uniquement à base d’ail et de feuilles de sauge bouillies. Deux légumes indispensables : la carde et les épinards, préparés en tian ou gratin. Point de viande mais des poissons – occasion de revisiter la morue, loup, muge, anguille – , l’aigo boulido (eau bouillie à l’ail en provençal), omelette aux truffes, artichauts, la soupe aux choux, des escargots à la poivrée, tians. Le repas se termine par les 13 desserts, seuls mets servis en abondance.
Selon la tradition qui remonte à plusieurs siècles, tout doit être disposé sur la table. En ce qui concernent les 13 desserts, les convives se doivent de tous les goûter ! Après « le gros souper », la famille se rend à la messe de minuit, sans fermer la porte à clef, sans enlever le couvert, car les anges vienront manger les miettes. Aujourd’hui, difficile de laisser ses portes ouvertes aux quatre vents ! Mais au retour de la messe, rien ne vous empêche de vous restaurer à nouveau puis il vous suffira de faire un baluchon avec les 4 coins de la nappe et de porter à des personnes démunies. Jolie tradition humaniste.
Joyeux préparatifs.