Resvératrol ? Mais qu’est-ce que c’est ?
Veratrum album L. var grandiflorum, le vératre blanc, fut extrait pour la première fois en 1939 par un japonais. Il fut aussi identifié en 1959 dans un eucalyptus puis en 1963 dans la racine du Fallopia japonica (ou Polygonum cuspidatum). Son identification dans la pellicule du raisin par les anglais Langcake et Pryce date de 1977 mais il a fallu attendre 1992, pour que E.H. Siemann et L.L. Creasy du Department of Fruit and Vegetable Science, Cornell University, Ithaca l’identifie finalement dans le vin.
Resvératrol – res : la chose du vérâtre – est une hormone végétale qui fait partie des moyens de défense de la plante contre le stress environnemental, contre les micro-organismes (tel qu’une attaque parasitaire comme le Mildiou ou le Botrytis ). Les cépages situés dans des zones pluvieuses et tempérées sont plus susceptibles d’être attaqués par les MO* et de fait, ont des taux de resvératrol plus importants. Les MO * se développent aussi lorsque les grains sont très serrés entrainant les mêmes conséquences.
Le resvératrol est fortement concentré dans la peau du raisin et les pépins. Flûte ! Souvent je les rejette et fus ravie de découvrir des raisins d’Afrique du Sud sans pépin.
Vin, jus de raisin et resvératrol
Les sources alimentaires de resvératrol sont restreintes : la meilleure étant le vin rouge avec une concentration de 1mg par verre selon les cépages bien entendu. Cette forte concentration dans le vin s’explique par la fermentation du moût qui permet d’extraire de la peau et des pépins et surtout par l’absence d’oxygène dans la bouteille qui prévient l’oxydation de la molécule. C’est l’explication à l’absence de resvératrol dans les raisins secs.. L’oxydation. Ce qui explique aussi qu’il soit abondant dans le vin rouge et moindre dans les rosés, quasi-absent dans les vins blancs qui sont pressurisés et fermentés en leur absence. Les plus riches sont les vins de Pinot noir (Bourgogne), de Merlot, de Grenache ou de Mourvèdre. Le cépage de Pinot noir contient le plus de resvératrol, avec une concentration pouvant aller jusqu’à 11,9 mg par litre.
Le raisins sur pieds en contient bien sûr, mais il est faiblement assimilable du fait qu’il se trouve dans la peau et les pépins.
Le jus de raisin en contient – tout comme le jus de canneberges- mais 10 fois moins que le vin rouge !
Le jus de raisin même s’il contient moins de resvératrol est intéressant pour la santé surtout pour les femmes enceintes ou les enfants pour qui l’alcool est contre-indiquée. Il contient des taux élevés d’anthocyanidines, acides phénoliques et autres polyphénols qui possèdent de belles qualités chimio-préventives et anti-oxydantes.
Le jus de raisin, le vin blanc et rouge contiennent des quantités importantes de picéide – dérivé du resvératrol – et les chercheurs pensent qu’il est possible que la dégradation du glucose contenu dans la molécule par les enzymes de la flore intestinale permette la libération de grande quantité de resvératrol.
Quid de la protection vis-à-vis des maladies cardio-vasculaires ? French paradox ? La médecine chinoise utilise le resvératrol , depuis des millénaires, en poudre obtenue par broyage de la renoué du Japon – faux bambou ou polygonum cuspidatum- pour traiter les maladies du cœur, du foie et des vaisseaux sanguins. Elle utilise aussi les racines de certaines variétés de veratrum pour soigner l’hypertension.
En Inde, la médecine ayurvédique utilise l’extrait de vigne – darakchasava – pour augmenter la force du cœur.
Selon l’OMS, le resvératrol pourrait réduire à lui seul 40% du risque cardio-vasculaire
La diminution de la mortalité des pays méditerranéens qui consomment modérément du vin, pourrait être également liée à leur consommation augmentée de fruits et légumes, d’huile d’olives et un apport modéré de viande. La solution pour un effet protecteur, serait de coupler le verre de vin aux dix fruits et légumes par jour, à l’augmenter les omégas 3 et diminuer les omégas 9, le sucre. Adopter le régime méditerranéen, en somme..
L’action anti-thrombotique du vin est en grande partie attribuée au resvératrol.
Ce polyphénol est digne d’un médicament de type aspirine puisqu’il possède une action anti-aggrégante sur les plaquettes.
Il diminue la viscosité sanguine, et du même coup les risques de formation de caillot (la thrombose) susceptible de boucher une artère.
Resvératrol, vin et cancer
Même s’il y a encore polémique sur ses propriétés, il y a consensus sur le fait que c’est le resvératrol qui en a le pouvoir. Il est capable de piéger les radicaux libres qui sont largement impliqués dans le processus de cancérogenèse. En 1996, les chercheurs ont établis qu’il avait une action sur les trois étapes de la cancérisation ( initiation, promotion et progression ). Les récents résultats sont à la mesure des attentes ! Oui, le resvératrol possède bien ces qualités – comme la curcumine. Des recherches sur animaux ayant des cancers induits – sein, œsophage, colon, mélanome, leucémie.. – ont montré son efficacité à des concentrations sanguines de 0,1 à 0,2 micromoles – quantité susceptible d’être atteinte par l’alimentation. Mais nous ne sommes pas des souris. Chez l’homme, ces recherches en sont à leurs balbutiements.
Des études ont montré qu’ un verre par jour de vin rouge diminue de 40% le risque de cancer de la prostate, alors qu’une consommation similaire de bière augmenterait faiblement le risque.
Le professeur Norbert Latruffe travaille sur le resvératrol depuis douze ans, au sein de son laboratoire dépendant de l’université de Bourgogne et de l’Inserm. L’équipe a réussi à mettre en évidence une autre propriété de cette substance, celle de déclencher la mort cellulaire et donc de supprimer les cellules cancéreuses. « Ce qui est encore mieux que d’arrêter la division » lance Norbert Latruffe. Un futur médicament contre le cancer ? Le professeur sourit et réplique : « La chose n’est, hélas, pas si simple. Le resvératrol ne reste pas dans les cellules, il est éliminé trop rapidement, cela limite donc son efficacité ».
Resvératrol et longévité
En revanche, l’action du Resvératrol sur la longévité est une certitude ! Cet effet serait dû à l’activation d’une protéine de la famille des sirtuines, qui augmenterait la vie des cellules en leur donnant le temps nécessaire pour réparer les dommages de l’ADN** au cours du vieillissement. En 2003, Howitz (1) et Sinclair après avoir testé de nombreux polyphénols sur la longévité de la levure de bière (Saccharomyces cerevisiae) ont ajouté du resvératrol dans le milieu de croissance d’une colonie de levures : de 21 générations en milieu normal, ce fut 36 générations avec le milieu enrichi !! Je sais, nous ne sommes pas des levures non plus ! mais des résultats similaires ont été obtenus avec des vers, des mouches, des organismes plus complexes.. sur des Nothobranchius furzeri., petits poissons à la longévité très courte, des singes… il est permis de rêver..
Le resvératrol est donc un polyphénol que l’on trouve dans notre alimentation principalement dans le raisin (surtout vin rouge), le chocolat noir (seconde source alimentaire de ce polyphénol après le vin), les baies rouges (myrtilles, bleuets, canneberges), l’arachide (cacahuètes non grillées), la rhubarbe, les mûres, la grenade, le sorgho.. issus de l’Agriculture Biologique (AB). En effet, les traitements de l’agriculture dite « conventionnelle », riches en pesticides et anti-fongiques, protégeant en quelque sorte la plante, empêchent pratiquement celle-ci de synthétiser le resvératrol (et la plupart des autres polyphénols) en réponse à une attaque extérieure. Un atout scientifique et healthy de l’agriculture biologique.
*Micro-organisme ** Acide DésoxyriboNucléique
Iconographie: Norbert Latruffe , le resvératrol dans la lutte contre le cancer et l’inflammation. Photo Philippe Maupetit- Symbole de la longévité
Source: (1): Polyphenol — Resveratrol
Docteur Béliveau : »les aliments contre le cancer »- « L’un des agents du « French paradox » : le Resvératrol du vin rouge ». Maryline ABERT, Docteur ès Sciences, Philippe Olivier COULOMB, Ingénieur Agronome, Philippe Jean COULOMB, Docteur ès Sciences, Professeur à la Faculté des Sciences d’Avignon