Qu’est-ce qu’une figure de style ?
C’est un procédé qui consiste à rendre plus expressif, plus percutant, plus frappant, ce que l’on a à dire. Elle permet d’impressionner son/ses interlocuteur(s). Elle est aussi appelée rhétorique. Je connais la litote, l’allégorie, l’ antithèse, l’assonance, la gradation, l’hyperbole, l’euphémisme, le pléonasme, la périphrase, l’anaphore.
J’aime les mots et en apprendre de nouveau me fait plaisir. Aujourd’hui, à cause de Monsieur Hamon – Ministre de l’Education Nationale sortant – et grâce à Jean-Paul Brighelli du Point, j’ai MON nouveau mot du jour ! Et quel mot ! Jugez-en : L’Anacoluthe. Je dois confesser que je n’ai jamais entendu ce mot, et ai des difficultés à me pardonner mon incurie. J’en voudrais presque à M. Pérignon, mon professeur de français.
Anaphores célèbres
Heureusement grâce aux Socialistes, nous devenons des virtuoses de la grammaire. A ce jour, plus personne n’ignore ce qu’est une anaphore.. Souvenez-vous .. Moi Président de la République, je… En réalité, je ne sais pas si c’est bien de se souvenir de cet exemple qui peut-être nous fait du mal.
Je préfère Don Diègue
« Mon bras qu’avec respect toute l’Espagne admire,
Mon bras qui tant de fois a sauvé cet empire » Le Cid 1, 4 de Corneille
Ou Eurycide
« Je veux qu’un noir chagrin à pas lents me consume,
Qu’ il me fasse à longs traits goûter son amertume ;
Je veux, sans que la mort ose me secourir,
Toujours aimer, toujours souffrir, toujours mourir.»(1) Suréna (1674), I, 3 de Corneille
ou
« Paris ! Paris outragée ! Paris brisée ! Paris martyrisée ! Mais Paris, libérée ! » de Charles de Gaulle, extrait du discours du 25 août 1944, suite à la libération de Paris dont on vient de fêter le 70ème anniversaire… par temps de pluie, mais à l’abri…Merci Madame Hidalgo.
J’ignorais aussi – Mon Dieu, quel manque d’érudition !- que Georges Marchais pourtant parfois fâché avec la grammaire, avait usé de ce procédé rhétorique.
« Nous disons à Mitterrand : L’heure n’est plus à l’ironie et aux petites phrases. L’heure est à la discussion. L’heure est à la décision. L’heure est à l’accord» 16 février 1978 dans le Monde.
Revenons à l’anacoluthe
Lors de la fête de la Rose en Saône et Loire, du dimanche 24 août, M.Hamon boosté par son ami du moment Arnaud M., s’enflamme et se lance dans une diatribe envers l’ Etat qui le nourrit et le ministère qu’il dirigeait (Enfin, il ne savait pas encore qu’il allait être remercié). Il s’emballe : « La réalité, j’vais vous dire, le système éducatif français, à bien des égards, il fonctionne de la manière suivante...». C’est une anacoluthe audacieuse précise M.Brigghelli enseignant, essayiste et auteur du blog « Bonnet d’âne » et plus encore.
Une anacoluthe est « une figure de construction qui consiste en une rupture de la cohésion syntaxique.
C’est-à-dire une transformation, au milieu de la phrase, de la construction grammaticale que le début de la phrase laissait attendre. Cette rupture dans la construction d’une phrase provoque généralement un effet de surprise.» « Il peut s’agir d’une faute involontaire à l’écrit » ajoute aimablement Lettres.org.
C’est un peu comme si on mélangeait deux phrases. Les causes d’anacoluthe sont :
- Absence de sujets là où c’est nécessaire
- Coordination d’éléments à régime différent
- L’apposition qui ne précède ni ne suit directement le mot auquel il se rapporte.
Souhaitez-vous un exemple afin de mieux saisir la nuance ? Le Larousse nous en livre un, très prosaïque, qui a le mérite d’être simple :
« Rentré chez lui, sa femme était malade ».
Ou celui-ci cocasse aussi,
« Enfin, en me mettant debout, il m’a serré la main et m’a souhaité une bonne journée. » où l’on peut imaginer que ce fut l’autre personne qui m’a mise debout.
Ah ! Evidemment, cela n’a pas le charme et l’élégance de ces anacoluthes :
« Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, la face du monde en eût été changée. » de Pascal dans ses Pensées. Si on corrige ce magnifique effet de style, la phase aurait pu être : Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, aurait changé toute la face de la terre…beaucoup moins poétique.
«Les hommes de l’Occident étaient en marche vers ceux de l’Orient afin de entre-tuer.» Traduction de Guerre et Paix de Tolstoï. Le sujet du verbe « s’entretuer » est manquant. La phrase devrait se lire : Les hommes de l’Occident étaient en marche vers ceux de l’Orient afin qu’ils puissent entre-tuer.
J’ai aussi appris qu’il existait des variétés d’anacoluthe :
♠ Anapodoton – du grec Ana : préfixe privatif et podote=muni de pieds, est une phrase « bancale » où il manque une partie. Ex : Les uns ne veulent pas parler et… du reste, je crois que personne ne sait rien« .. Que veulent les autres ? Personne ne saura.
♠ Anantapodon– du grec Anta : en face et podote=muni de pieds, est une phrase- à-cloche-pieds où une des alternatives manque. « Tantôt il s’enthousiasmait du voyage.. Qu’avait-il donc à gagner à s’éloigner des siens ? »
Ravie d’avoir augmenté mon savoir. Belle journée.
(1) Cette pièce fut un désastre et mit fin à la carrière d’auteur dramatique de Corneille, mais aujourd’hui, elle est reconnu comme chef d’oeuvre
Sources : Article du Point de ce jour : Brighelli : à l’Éducation, une idéologue en chasse un autre – Capsule linguistique – Lexique des figures de style Par Nicole Ricalens-Pourchot