Cette lecture était survenue fort à propos à l’approche de la célébration du débarquement en Provence, désigné sous le nom de code Anvil et Dragoon, le 15 aout 1944 entre Toulon et Cannes. Pour la petite histoire, Churchill était opposé à ce débarquement : d’où le changement de nom Dragoon ( dragooned en anglais veut dire contraint.)
Un aspect peu connu du retour à la paix après la seconde guerre mondiale : le déminage après 1945 qui a été une tâche essentielle de la reconstruction du pays. Je savais pour les plages normandes, mais j’ignorais pour celles du Sud.
Claire Deya s’empare de ce sujet historique dans son premier roman, inspiré de son histoire familiale. Le personnage de Saskia a quant à lui réellement existé : une femme s’est confiée à l’auteure et lui a raconté son histoire.
Les plages de la côte d’Azur ont été truffées de mines, engins mortels. Mais aussi les bâtiments, les champs. La population souhaite reprendre leur vie normale après toutes ces horreurs et s’offrir des baignades en famille, travailler leurs terres… Mais il leur faut attendre que le courageux Fabien et son équipe « nettoient » aux périls de leur vie. Une équipe composée d’hommes aux motivations bien cachées mais aussi de prisonniers allemands qui contrairement aux accords de Genève sont mis à contribution pour réparer.. Parmi eux, il y a Vincent à l’identité trouble qui cherche Ariane, son amour d’avant la guerre. Non, non, ce n’est pas encore une énième histoire d’amour sur fond de guerre ! Nous faisons connaissance avec Lukas, prisonnier allemand, fin lettré. En parallèle nous suivons la jeune Saskia qui revient d’un camp de la mort. Et aussi Léna, Matthias, Max, Éléonore…
Les opérations de déminage sont parfaitement détaillées et documentées, elles font frémir.
Les chapitres sont courts, l’écriture vive et fluide. Les personnages sont tous très attachants, les psychologies bien décrites. Il y a les héros souvent humbles (qui seront souvent oubliés), les infâmes (dénonciateurs, collaborateurs, profiteurs…), si la majorité de la population ne s’est pas mal conduite, elle n’a pas eu non plus assez de courage pour agir. Je ne peux m’empêcher de songer à ce que j’aurais fait dans ces conditions… Comment devient-on un héros ? ou un salopard ?
Beaucoup d’émotions à la lecture, ce que vivent ces rescapés de guerre est tellement difficile. Mais aussi de l’effroi, de la colère, de la honte… La postface est poignante.
Il est aussi question de confiance, trahison, courage, pardon, vengeance, résilience, honneur, haine, réconciliation..
Un roman très documenté, véritable page-turner. Merci aux editions de l’observatoire et Claire Deya pour ce travail de mémoire.
Le monde à refaire de Claire Deya
413 p – 01/2024 – Editions de l’observatoire
Ce fut une lecture pleine d’émotions.
Très émouvant