Amandine Péchiodat et Jean-Loup Chiflet ont collecté avec humour, les mots qui manquent aux Parisiens. Très drôle ! A lire absolument.
Souffrez-vous de châtelépouvante ? Savez-vous que Justine aplusse, tandis que Marguerite abientôte. J’aime beaucoup les mots, les jeux de mots aussi.
Jean-Loup Chiflet est écrivain, il est également éditeur, passionné par les expressions idiomatiques, les nuances, les difficultés grammaticales et les aberrations de la langue française. Sa marotte consiste à s’instruire en s’amusant, ce qui lui vaut un joli succès depuis des années. Il est l’auteur d’une soixantaine de livres de bonne humeur dont « La Théière de Chardin » en 1979 qui donnait le ton, « Sky, my husband » regard drolatique sur la traduction du français à l’anglais qui fit un triomphe, « Ad aeroportum ! : le latin d’aujourd’hui », « Antigone de la nouille » « Oxymore, mon amour ».. et bien d’autres. Il est aussi l’auteur des adaptations des dessinateurs du «New Yorker». Tous ses volumes valent leur pesant d’or.
Il vient de concocter avec Amandine Péchiodat – la plume du très branché site My Little Paris – avez-vous l’appli?– « les mots qui manquent aux parisiens« , petit opuscule de 98 pages.
Ce livre est très plaisant et particulièrement drôle, superbement illustré par Kanako Kuno, illustratrice talentueuse de My little Paris ( j’adore toutes ses illustrations réalisées au pinceau et à l’encre japonaise) (1). Il se présente tel un dictionnaire thématique – amour, mode, quotidien.. environ neuf rubriques – et nous offre même la phonétique et des expressions prises dans leur contexte. J’en suis toute ébaudie tellement ces mots sont criant de vérité et nous manquaient vraiment. Si j’osais, je confesserai être un tantinet envieuse de ne pas les avoir inventés, ayant l’impression que ces vocables étaient sur le bout de ma langue lorsque je me suis trouvée dans ses situations.
L’ouvrage se feuillette avec grand plaisir, le sourire aux lèvres et une folle envie de partager et rire en bonne compagnie. Très souvent, une image, une personne, un cliché apparaissent.
Quelques mots qui manquent aux Parisiens
J’aime tout particulièrement
Aplusser [aplyse ] : se quitter en utilisant systématiquement A+ . Nous avons tous dans notre entourage des aplusseurs, assez irritants.
Abientôter : dire systématiquement « à bientôt » à des convives après un repas alors que l’on sait qu’on ne les reverra jamais.
J’aime aussi « aPhone ».. se dit d’un Parisien –pas que – qui panique, privé de son iphone à cause d’une panne de batterie. Très à cheval sur la grammaire- le préfixe « a » du grec est privatif – et taquin – car alors sans voix!
Coucouvent : Coucou de la main auquel on répond avec enthousiasme, alors qu’il ne nous était pas destiné.
Soukamain n.f. : Sac à main de Parisienne bordélique. Je suis convaincue que beaucoup de sacs en sont…enfin souvent le mien, même si j’ai adopté l’organisateur de sac.
Braquéclair : clin d’œil rapide vers la fermeture de sa braguette pour vérifier qu’elle n’est pas ouverte. Je glousse en me souvenant de professeurs d’amphi..
Vous retrouverez le « toutafiste » qui vous l’avez deviné est celui ou celle- très hérissant (e)- qui remplace tous ses oui par des « tout-à-fait ». J’affectionne parce que surement du vécu : Encouettement : ensemble de manœuvres qu’il faut déployer pour enfiler une housse de couette. Surtout si elle mesure 240×280..
Je souffre d’un manque de temps et je « procrafixe » parfois : envisager de se voir sans le faire. Exemple : « Il faut absolument qu’on se voie ! – C’est clair ! On s’appelle ? – Ok, on s’appelle ! ». Qui se reconnait aussi ?
Dans la même veine que la châtelépouvante – panique du Parisien qui doit faire un changement de rame à la station Châtelet- il existe un Parisien – parfois le même, j’en connais un- qui a en plus la « wagonpoisse », c’est-à-dire la malchance de tomber sur un wagon de métro où se produit un pseudo-accordéoniste et sa sono ambulante !
Très évocateur, le « jusquaubookisme » qui est la propension à acharner à lire et relire un livre sans parvenir à dépasser la onzième page, parce qu’on ne se résout pas à abandonner tant les critiques sont bonnes. Cela vous fait songer à quelqu’un ?
C’est drôlissime, juste assez snob, teinté de branchitude, intelligent, spirituel, jamais méchant. Un seul regret le titre.. Il n’y a pas que des Parisien(ne)s. Une provinciale qui aime beaucoup Paris.
Iconographies: Kanako Kuno- (1) RDV sur son Pinterest pour vous régaler