Le contreténor est à la mode ! Valer Barna-Sabadus, Max Emanuel Cencic, Xavier Sabata, Philippe Jaroussky, Franco Fagioli, David Hansen, Bejun Mehta, Graham Pushee, Franco Fagioli, Andreas Scholl.. Le choix est très vaste.
Philippe Jaroussky, contre ténor le plus convoité
J’ai une inclination pour la musique baroque et une passion pour Philippe Jaroussky. Je l’écoute en boucle. A 40 ans, il est une vraie star qui cumule les disques d’Or et les triomphes. Il est beau, il est jeune, il est français – une peu de fierté nationale.
Contre-ténor, voix de castrat ?
A Etienne Billault de Evene.fr qui lui demandait de définir sa voix, il répondit : « Je chante dans la même tessiture qu’une soprane ou mezzo-soprane, c’est-à-dire, une voix de femme. Le contre-ténor est une voix qui a existé par le passé et a qui été abondamment employée avant l’époque des castrats »
J’aime les voix de castrats .. J’ai ce point commun avec Ève Ruggieri. Je suis très sensible à ce timbre qui m’émeut beaucoup, qui me transporte. J’écoute aussi, avec grand frisson Carlo Broschi dit Farinelli (1705-1782), très connu grâce au film éponyme.
De nos jours, cette pratique n’a plus cours – heureusement, Clément XIV l’a faite interdire. Le répertoire qui leur était dévolu, est attribué à un contre-ténor. La tessiture de la voix est plus réduite, la pomme d’Adam s’étant développée, le larynx descendu diminuant l’amplitude de la résonance.
La voix haut-perchée de contre-ténor fait partie du registre vocal masculin. Les castrats l’ont représenté pendant près de deux siècles. Encore aujourd’hui, cette voix reste entachée par des préjugés.
Cependant, le contre-ténor, défini comme « vocaliste masculin recourant à la voix de fausset » prend sa place et même son envol si l’on en juge par le nombre de candidats.
D’une vingtaine il y a 20 ans, ils sont une centaine aujourd’hui !
Le contre-ténor n’est ni un haute-contre, sorte de ténor aigu qui développe une voix de poitrine, ni un falsettiste ou fausset, comme on dit parfois.
C’est un homme qui a mué à l’adolescence qui a choisi de travailler sa voix « de tête » pour servir l’art du chant et faire partager ses émotions. Il n’est pas asexué et il n’a que peu de points communs avec le castrat, si ce n’est le répertoire baroque. Il chante en voix de tête tandis que le ténor ou baryton chantent en voix de poitrine. Il est capable de recourir à la voix de poitrine pour des voix mixtes ou certaines notes graves. Or cette voix n’a rien de surnaturel du tout, elle repose sur des phénomènes physiologiques bien connus et une technique très solide précise-t il.
Si Cencic se targue d’être un « mezzo », Jaroussky et Daniels, Fagioli fréquentent avec aisance le registre de soprano avec le la et le si bémol, voire le contre-ré.. Mais le plus, est qu’ils peuvent incarner sur scène des rôles de soprano masculins mais aussi de femmes. Je e suis régalée avec Artaserse à Nancy avec Jaroussky et Emanuel Cencic, en 2012.
Le contre ténor a ses détracteurs qui s’agacent à les entendre dans le répertoires baroques. Ils disent que Haendel n’a écrit pour eux que quelques oratorios et Vivaldi n’y a eu jamais recours !
Philippe Jaroussky, un prodige et multi-talent
Il est russe d’origine. Son grand père fuyant les Bolchéviks, se retrouve à la frontière où on lui demande son nom. Il répondit « ya – russky » (ce qui signifie « Je suis russe »). (1) et ce nom est resté. Tout jeune, il était très attiré par le dessin et la peinture. Comme beaucoup de musicien professionnel – ou du dimanche- , la passion pour la musique naît d’une rencontre à l’école, avec un professeur de musique qui sait engendrer cet amour. Le sien fut un professeur de 6 ème, au collège de Sartrouville qui faisait écrire des chansons à ses élèves. Séduit par sa voix, il alla voir ses parents afin de les encourager à lui faire prendre des cours au Conservatoire. Il apprend alors le violon,« Jouer, dit il, est vite devenu une obsession ». Ses parents lui demandèrent de passer son bac.. ce qu’il obtint. Il reçut le premier prix du conservatoire de Versailles, à 18 ans. Il apprend aussi le piano afin de comprendre mieux la composition musicale.
En 1996, une autre rencontre décisive : il est transporté par la voix de Fabrice Di Falco à un concert baroque, il décide de rencontrer Nicole Fallien, sa professeure de chant. D’ailleurs, il travaille encore avec elle. Ensuite, tout s’emballe. De belles rencontres : le contre ténor Gérard Lesne, le chef Jean-Claude Malgoire.. Enregistrements, concerts. Consécration.
Je n’ai pas trop envie d’être un contre-ténor qui passera son temps à enregistrer des compilations d’airs de Haendel dit il(3). Il souhaite faire découvrir des œuvres : Antonio Caldara, airs d’opéra de Johann Christian Bach..
Il ne joue pas les faux modestes. Il est naturellement ouvert aux autres, bienveillant et heureux de servir la musique.
«Or moi, je veux garder la jubilation de chanter ! »
Mais, son avenir ne l’inquiète nullement : si un jour, sa voix faiblissait, il serait prêt pour la direction, qu’il pratique déjà avec intensité et rigueur. En 2002, il a fondé l’Ensemble Artaserse, qui se produit partout en Europe.
Il a l’étoffe des grands et le cœur pur. Philippe Jaroussky est le parrain de l’Association IRIS qui représente les patients atteints de déficits immunitaires primitifs.
Ecoutez-le. C’est époustouflant d’émotion.
Se ravir les oreilles avec le Requiem de Fauré ?
Photos: Ptolémée – Philippe Jaroussky© Ville de Nancy dans Artaserse
Source:(1) source (2) express Bertrand Dermoncourt, publié le 06/05/2009 (3) interview de 2004- IRIS : site de l’association
Pour en savoir +: le site de Philippe Jaroussky