J’ai abordé Tamara de Lempicka par Kitty en rose, il y a fort longtemps. J’ai adoré ce tableau, ce qui n’est guère étonnant car vous connaissez peut-être ma faiblesse pour les arts décoratifs et les années folles. En ce jour anniversaire ou presque – elle est née le 16 mai 1898 – j’ai envie de lui rendre hommage. Tamara Łempicka – prononcez à la polonaise si vous le voulez bien Ouèmpitska – n’a pas une oeuvre très conséquente – environ 150 toiles – mais elle reste une référence lorsqu’on évoque les XXème siècle.
Tamara de Lempicka icône des années folles
Elle fut élevée dans une famille aisée et cultivée qui partage sa vie entre saint-Pétersbourg, Varsovie et Lausanne. Elle est inscrite à l’Académie des Beaux Arts de Saint-Petersbourg lorsque la guerre éclate. Elle épouse en 1916 Tadeusz Łempicki, jeune avocat. La révolution d’Octobre va bouleverser sa vie : Comme beaucoup elle va fuir la Russie, rejoindre des cousins qui l’ont précédée en exil à Paris. Tamara commence alors avec beaucoup de ténacité une carrière de peintre… et une vie de plaisir.
Comme tous les Russes Blancs, ils sont arrivés sans argent. Les Lempicki vont vivre pendant un certain temps de la vente de bijoux de famille. Elle va mener une vie mondaine très riche : elle fréquentera aussi André Gide, Pablo Picasso, Jean Cocteau, des princes russes immigrés, elle est de presque toutes les fêtes. Excentrique, dépensière, frivole, aimant la vitesse, elle incarne la femme des années folles, la garçonne et la femme émancipée. Elle est mariée certes mais elle assume sans aucune gêne sa bisexualité. Elle peint le jour – elle était un bourreau de travail- et la nuit, elle revêt sa tenue de jet-setteuse dirions-nous aujourd’hui.
Dès 1920, la presse internationale loue ses tableaux et son style si particulier.
En 1925, elle participe à la première grande Expo Arts Déco (Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels de Paris) et tient à Milan sa première exposition personnelle. Sa renommée grandit.
Invitée par Rufus Bush a peindre un portrait de sa fiancée, elle se rend à New -York en 1929 où elle observe les gratte-ciels tels que Chrysler Building, Empire State Building, très arts déco.
De Lempicka a employé la méthode «cubiste synthétique» c’est-à-dire de petits plans géométriques accumulés qui donnent un effet voluptueux. Elle a peint des nus ce qui est très art déco.
De comtesse, elle devient baronne. Tout en assumant ses amours lesbiennes, elle divorcera en 1928 pour se remarier en 1933, avec le riche baron hongrois Raoul Kuffner de Dioszegh. Elle qui fut l’égérie des plus grands photographes et des couturiers de renom Coco Chanel et Elsa Schiaparelli.
Kizette a été négligée, mais aussi immortalisée. Kizette est la fille de son premier mari. Elle l’a peinte à plusieurs reprises, en laissant une série de portrait saisissant : Kizette en rose 1926, Kizette sur le balcon, 1927, Kizette qui dort, 1934, Portrait de la baronne Kizette, 1954-5, etc. Dans d’autres tableaux, les femmes représentées ont tendance à ressembler à Kizette, ne trouvez-vous pas ?
L’auto-portrait de Tamara de Lempicka est l’image de la femme indépendante qui s’affirme : mains gantées, casquée et inaccessible. Cette œuvre est en fait le fruit d’une commande passée par le magazine de mode allemand » Die Dame » qui en fera ensuite une de ses couvertures. Ceci révèle combien l’artiste s’associait bien volontiers avec le milieu glamour et clinquant de la mode. pour la petite histoire, elle possédait bien un bolide mais pas une Bugatti mais une Renault jaune.
Tamara de Lempicka a peint les portraits de ceux qu’elle rencontrait : les riches, l’élite et les célèbres.
Elle a rarement peint des hommes.
Elle va immigrer une seconde fois lorsque la grande Bertha et Hitler menacent la France, elle part aux Etats-Unis en 1939. Elle continuera à mener sa vie de mondaine à NY. Elle est devenue « la baronne avec une brosse ». Dans les années 1960, elle se tourne vers l’art abstrait en changeant de style, en utilisant le couteau à palette au lieu de brosse. Ces tableaux furent mal accueillis, elle avait perdu sa flamme art déco ! Elle peint des vieillards, des religieuses..
A la mort du baron, elle vend tout et se rapproche de sa fille Kizette qui vit avec son mari au Texas. La cohabitation se passe mal. En 1978, elle s’isolera dans une hacienda au Mexique. Kizette à la mort de son mari viendra vivre avec elle. Elle l’assistera jusqu’à sa mort dans son sommeil le 18 mars 1980 à Cuernavaca au Mexique, presque oubliée, mais juste au moment où l’on redécouvrait ses œuvres. Kizette a dispersé ses cendres au sommet du Popocatépetl.
Longtemps ignorées par les critiques qui considéraient son travail comme « chic et toc », elle est peu à peu réhabilitée. La plupart de ses œuvres sont dans des collections privées, certains de ses tableaux affichent désormais une cote entre 300 et 750.000 euros.
Les arts décoratifs
Si je vous dis « Art déco » abréviation de « Arts décoratifs », vous songez immédiatement à la verrerie, ameublement, tapisseries, vitraux, peintures et sculptures ornementales, à René Lalique, Armand Rateau, Jacques Emile Ruhlmann ? Et vous avez raison ! L’art déco est une réaction à l’art nouveau avec ses volutes et ses fleurs, en remettant les lignes graphiques et symétrie, la sobriété à la mode. Vous savez surement que certains qualifiaient l’art nouveau de « molles » ou encore de « style nouille » ! L’Art déco est aussi le premier style à avoir eu une diffusion mondiale. Tamara est peintre arts déco avec un arrière fond cubiste.
Les femmes peintes par Tamara
« Une lumière à la manière d’Ingres, du cubisme à la Fernand Léger, avec du rouge à lèvres Chanel », résume un critique d’art de l’époque.
Regards voluptueux et interrogateurs, bouches pulpeuses, les couleurs vives, fonds sombres.. Son style est reconnaissable. Elle utilise des couleurs vives mais une seule à la fois, j’aime beaucoup cette ambiance.
Les tableaux de Tamara de Lempicka sont le reflet de la vie qu’elle a menée, des années jazz. Ses tableaux ont des airs d’affiches. Elle a peint les femmes des Années folles comme personne.
On note l’évolution de son travail : par exemple la « Vierge à l’enfant », » Les Réfugiés » sont certainement le fruit d’ une période de peurs et de doutes.
Je veux qu’au milieu de cent autres, on remarque une de mes œuvres au premier coup d’oeil » Tamara de Lempicka
Tamara, soyez rassurée, il en est ainsi.
En Une :
|Vous aimez Tamara de Lempicka ? J’adore. J’ai une folle envie de regarder Gatsby..
Bonjour, je peins en construisant mon propre musée. Toujours des toiles de 5×5 cm. Actuellement les autoportraits les plus marquants de l’histoire de l’art. En accord complet avec ce que vous écrivez sur Tde L. J’ai un problème avec celui de Tamara : que représente la forme située entre son avant bras ganté et son étole ? À côté d’un discret reflet métallique ?
Merci de me dire si vous avez une idée.